Association Chemins à Fer

Novembre 2009 et avril 2010 : plongées dans le tunnel de La Fourcherie (Corrèze)

Lors de la réunion des contributeurs de Pâques 2009, ITFF avait redécouvert les entrées cachées, bouchées et noyées du long tunnel inachevé et abandonné de la Fourcherie, en haute Corrèze.

Comme il est raconté dans la fiche inventaire correspondante, cet ouvrage pose bien des énigmes. C'est pourquoi, pour connaître l'état exact de ce patrimoine englouti, nous avons décidé de plonger les entrées du tunnel. Il existe en effet des tunnels noyés ; mais ceux-ci ont été construits tout à fait normalement, utilisés puis noyés ensuite par des lacs de barrage venus les recouvrir. Il n'y a que le tunnel inachevé de la Fourcherie à avoir été réoccupé par les eaux d'infiltration après abandon du chantier, en raison de son architecture particulière en V.

Une plongée a donc eu lieu, lors du week-end de Toussaint, dans la tranchée noyée de la Fourcherie. C'était une première dans l'histoire ferroviaire française. Pour ce faire, nous avons fait appel à deux plongeurs hautement qualifiés de la Fédération Française de Spéléologie. Cependant, l'opération a été rendue très difficile en raison d'une visibilité nulle et de l'accumulation peu commune de débris végétaux (feuilles, branches, arbres entiers) dans cette "mare" particulièrement glauque et peu sympathique. Toutes les investigations ont dû se faire par tâtonnements.

Elles ont cependant démontré qu'il n'y a jamais eu de galerie ouverte sur ce site qui, manifestement, n'était qu'un gros sondage de surface pour de futurs travaux qui n'ont jamais vu le jour. Mais elles ont confirmé l'existence de deux murets parallèles en béton, distants de 5 à 6 m environ, d'une centaine de mètres de long et de 40 cm d'épaisseur. Proches de la surface à l'entrée ouest de la tranchée, ils s'enfoncent progressivement dans cette dernière et on en perd la trace vers 3,50 m de profondeur. Leur hauteur exacte n'a pu être déterminée.

Voici quelques photos de cette opération :


Le briefing préparatoire dans notre "QG" corrézien, le fort sympathique café Lafon de Merlines.

Le dimanche matin, mise en place dans un paysage automnal de toute beauté.

Recherche du lieu adéquat pour la mise à l'eau des plongeurs. La végétation des berges donne déjà une idée de ce qui les attend dans la tranchée noyée

La mise à l'eau


La plongée

Deux heures après, la sortie, enfin !! L'eau était à 6°.

Résultats et débriefing général, sous l'oeil de la caméra. Alors, silence, on tourne !

Il y a tout juste un an, lors de notre réunion des contributeurs de Pâques 2009, nous avions redécouvert la galerie d'accès (fenêtre tunnelière), oubliée et cachée, du long tunnel de la Fourcherie, un ouvrage ferroviaire commencé, jamais fini et abandonné. Derrière le tas de pierres qui la dissimulait, cette ouverture semblait définitivement murée et condamnée. Cependant, l'un d'entre nous, petit malin, suggérait qu'il y avait peut-être une porte cachée par les pierres. Nous retournâmes donc sur place gratter le sommet du tas pour vérifier cette hypothèse. En effet, un linteau nous apparut très vite et, mieux encore, la porte dégondée nous livra un faible passage pour tirer quelques clichées à bout de bras. Ceux-ci révélèrent que la galerie était inondée.

Dès lors, l'exploration devenait indispensable, d'autant que le tunnel de la Fourcherie soulevait bien des énigmes parmi le petit monde des passionnés de patrimoine ferroviaire. Il suffisait juste de trouver les plongeurs adéquats, d'obtenir les autorisations nécessaires et de déblayer le tas de pierres.

Ce travail a demandé un an de préparation et a trouvé sa finalité dans une formidable opération de plongée souterraine qui est une première puisqu'il n'existe pas dans notre pays d'autres tunnels abandonnés et noyés par les eaux d'infiltration. Voici donc les photos de ce grand moment d'histoire ferroviaire.


Comme d'habitude, chez nous, tout commence par un grand repas convivial.

Mais très vite le sérieux et les obligations reprennent le dessus. Alors il faut bien travailler au petit-déjeuner.


La "fenêtre" d'accès au tunnel vient d'être déblayée. La voici telle qu'elle apparaît. Deux d'entre nous s'activent à lui rendre un aspect plus présentable.

Elle révèle alors le théâtre de nos futurs exploits : 2300 m de galerie noyée à explorer.

Les plus jeunes membres du groupe en profitent pour se faire photographier dans l'entrée de la galerie.
Ce n'est pas tous les jours qu'elles auront l'occasion de vivre pareil moment historique.

C'est alors que se présente un homme. Il a 85 ans, il a travaillé pendant 4 ans au chantier du tunnel, de 1951 à 1955. C'est la mémoire vivante du tunnel. Il va tout nous dire sur ce dernier.

Les révélations de notre témoin posent un sérieux problème. La profondeur annoncée est beaucoup plus grande que prévue. Une conférence au sommet s'impose.


Et un volumineux matériel doit être déployé.


Le premier plongeur de reconnaissance se prépare. Pas facile de se déplacer avec 100 kg de matériel sur le dos.


Puis vient le moment du départ. Ca y est, il est parti. Son accompagnatrice ressort du trou, satisfaite de la mise à l'eau. Tous les espoirs sont permis.


Pendant ce temps, tout le monde est entendu par la journaliste. Un véritable interrogatoire, tout y passe : nom, prénom, qualités... Il en résultera un superbe article dans le journal. Grand merci à elle et au photographe.



Hélas, le plongeur de reconnaissance revient très vite. Chose inattendue : la galerie est truffée d'algues qui rendent la visibilité nulle.

Il est alors midi. De copieuses grillades viennent consolider le moral. Pendant que d'autres profitent de ce moment de détente pour se baigner dans le lac de Bort-les-Orgues.


Mais il faut remettre ça. Le deuxième plongeur va tenter le coup avec une autre technique.


Cet ancien tuyau court tout au long de la galerie. Il va être un précieux guide dans ce milieu sans visibilité.

Pendant ce temps, d'autres membres retrouvent le "puits" sondage signalé par La Vie du Rail.

Le deuxième plongeur ressort de la fenêtre. C'est un demi-succès. Le plongeur a pu parcourir et équiper 700 m dans la galerie de la fenêtre. Mais il n'a pu rejoindre le tunnel ferroviaire proprement dit.

Deuxième jour : Le camp se réveille tout doucement.

La plongée est affaire de technique. Mais aussi de mental. Cette fois, on vaincra.





Le départ du plongeur : une immense solitude.

Les trois et quatrième plongées sont des échecs. Les conditions sont très dures, la visibilité nulle. En témoigne la fatigue qui se lit sur les visages. Cette fois, la sortie du trou est définitive.

Un dernier repas vient clôturer cet extraordinaire moment d'amitié. Grâce aux bons soins de notre cuistot qui s'est dépensé sans compter autour de ses grillades.

De gauche à droite, la mémoire vivante du tunnel, l'organisateur et l'un des plongeurs.

Les meilleurs moments ont une fin. Il est temps de refermer la porte. Quand sera-t-elle rouverte ?

Les redécouvreurs sont tous là. Ils ont écrit un beau moment d'archéologie ferroviaire.

Et tout cela sous l'œil bienveillant de notre Cher et Vénéré Président.

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